jeudi 7 mars 2024

Changer l'eau des fleurs - Valérie Perrin.


Violette Toussaint est garde-cimetière dans une petite ville de Bourgogne. Les gens de passage et les habitués viennent se réchauffer dans sa loge où rires et larmes se mélangent au café qu’elle leur offre. Son quotidien est rythmé par leurs confidences. Un jour, parce qu’un homme et une femme ont décidé de reposer ensemble dans son carré de terre, tout bascule. Des liens qui unissent vivants et morts sont exhumés, et certaines âmes que l’on croyait noires, se révèlent lumineuses.

Après l’émotion et le succès des Oubliés du dimanche, Valérie Perrin nous fait partager l’histoire intense d’une femme qui, malgré les épreuves, croit obstinément au bonheur. Avec ce talent si rare de rendre l’ordinaire exceptionnel, Valérie Perrin crée autour de cette fée du quotidien un monde plein de poésie et d’humanité.



Changer l’eau des fleurs était l’un des romans que j’avais le plus hâte de lire pour le Blossom Spring Challenge, ainsi je n’ai pas tardé à l’emprunter le plus vite possible à la médiathèque pour le lire.



Que dire, à part : quel ENNUI total et Dieu merci, je n’ai pas dépensé un seul centime pour ce livre !


L’histoire est celle de Violette Toussaint (nommée ainsi car sa peau était de cette couleur quand la sage femme l’a trouvé à la naissance, si, si), garde-cimetière dans une ville de Bourgogne, une femme abîmée par la vie mais qui continue à prendre la vie comme elle vient, à chérir son travail, son quotidien, sa petite maison, ses amis. Elle a pris l’habitude de recevoir les gens de passage ou les habitués du cimetière dans sa maison, à leur prêter une oreille attentive, découvrir leur histoire et celle du défunt que ces gens viennent voir. Petit à petit, nous sommes amenés à découvrir la vie de Violette, les drames qui ont parsemés sa vie, comment elle est devenue ce qu’elle est, etc.


Il m’est rapidement devenu évident que l’histoire allait être longue, et ça ne va pas en s’arrangeant. Tout continue à aller à un rythme lent, j’ai d’ailleurs fini par survoler des pages sur la fin. Si le « mystère » autour d’Irène Fayolle et pourquoi elle veut reposer auprès d’un autre homme que son mari ne m’a fait ni chaud ni froid, j’ai eu un semblant d’intérêt pour l’affaire autour de [spoiler] la mort de la fille de Violette et comment son père cherche à découvrir la vérité [/spoiler], et la thématique autour du deuil d’un enfant était vraiment touchante. Il y a aussi eu quelques petites rencontres sympathiques parmi les gens que Violette est amenée à rencontrer, et le petit groupe gravitant autour de Violette forme une dynamique plutôt sympathique (les employés du cimetière et des pompes funèbres notamment).


Ce qui m’a sauté aux yeux était aussi l’omniprésence des histoires d’amour, et par n’importe lesquelles. Je n’ai pas pu m’empêcher de remarquer que la quasi totalité des histoires d’amour n’était que l’objet d’une tromperie. Nous n’avons pas UN SEUL personnage, surtout féminin, qui ne trompe pas son conjoint ou qui n’est pas la maîtresse, sans que ces femmes veuillent quitter leur mari pour autant, sans doute pour ajouter de la tragédie à ces histoires d’amour, d’autant plus que ces femmes trouvent rarement leur grand amour auprès de leur mari mais toujours auprès de l’autre homme avec qui elles trompent leur conjoint. Qu’est-ce que je dois en déduire ? Qu’on ne peut connaître l’amour véritable qu’en trompant son conjoint et en allant coucher ailleurs ? Vu la panoplie de personnages et les histoires qu’ils racontent sur eux et sur le défunt qui leur est cher, je ne m’étonne pas de trouver des histoires de tromperie… mais enfin, quand c’est la quasi totalité des personnages, on est quand même en droit de penser que c’est exagéré, et que c’est romancer les histoires d’infidélité au maximum. À croire que l’auteure est allergique aux histoires d’amour sans infidélité.


Enfin… est-ce que je peux parler d’histoires d’amour quand il s’agit plus exactement d’une sorte d’« amour passion » qui est complètement déconnecté de la réalité, une sorte de folie qui prend chacun de ces personnages sans qu’on en perçoive la chaleur ou l’alchimie, d’autant que certaines de ces relations sont très discutables (un demi frère et une demi sœur, une tante et son neveu, etc), des viols banalisés, etc.


Le concept était pourtant intéressant. Notre personnage principal qui exerce le métier peu commun de gardienne de cimetière, découvrir davantage ce métier méconnu, les rencontres que Violette fait à travers son métier, découvrir ces personnes et leur histoire ainsi que l’histoire du défunt. L’occasion de découvrir une panoplie de vies différentes et passionnantes… mais la plupart de ces histoires ne sont que des romances et des infidélités. Pour l’originalité et la diversité, on repassera…


Ajoutez à cela des phrases dites à la Anna Gavalda, c’est-à-dire avec des métaphores qui ne tiennent pas debout, des phrases qui se veulent poétiques ou philosophiques mais qui sonnent très étranges. Vous voulez des exemples ?


« Je suis gardienne de cimetière, je ne bois que des larmes »
« Quand une femme perd son mari, on l'appelle une veuve. Mais quand une femme perd son amant, comment l'appelle-t-on ? Une chanson ? »
« L'automne est une berceuse pour la vie à revenir. »
« 
Mon mari avait 10 ans de plus que moi quand je l'avais rencontré. Cette différence d'âge lui donnait de la hauteur. J'avais l'impression d'être un papillon qui regarde une étoile »


De façon paradoxale, d’autres dialogues sont écrits avec une certaine vulgarité, notamment les scènes de sexe (et il y en a…), par exemple « Il m'a retournée. Sans me regarder. Il a baissé ma culotte, il a écarté mes cuisses. Pas de caresses. Pas de mots du tout. Il m'a baisé par derrière sans me regarder, me faisant pousser des cris de truie qu'on égorge » (très romantique tout ça…), ce qui ne colle pas avec l’ambiance générale du livre qui baigne le plus souvent dans le pathétisme et le tragique. Nous avons donc affaire soit à des dialogues crus, des longueurs, des répétitions, ou bien des phrases incompréhensibles dans leur poésie ou philosophie… Personne ne se parle comme ça dans la vraie vie, ce n’est vraiment pas crédible !


Concernant les personnages, je ne les ai trouvé ni attachants ni mémorables, y compris l’héroïne que j’ai trouvé insipide, apathique et manquant cruellement de caractère ou encore son mari qui est passé de salaud à victime le plus simplement du monde. Il y a quelques personnages comme LéonineSasha et Célia qui sauvent un peu les meubles, mais sans plus.


Bref, c’est un roman avec un concept de départ intéressant, il y a de bonnes idées, quelques passages sympathiques mais ça reste un pêle-mêle d’histoires sans queue ni tête, un roman composé à 99 % d’histoires de tromperies, avec une écriture déconcertante. Ce roman n’était vraiment pas fait pour moi. Après, je ne juge pas ceux qui l’ont adoré, à chacun ses goûts… Il faut dire que l’histoire a un vrai potentiel sympathique, mais je m’attendais à quelque chose de différent. J’admets ne pas être le bon public pour ce roman et je le laisse volontiers à d’autres lecteurs/trices plus enthousiastes que moi.


En général, les visiteurs aiment se prendre les pieds dans les chats du cimetière. Beaucoup d'entre eux se disent que leur défunt se sert des félins pour leur faire un signe. Sur la tombe de Micheline Clément (1957 - 2013) il est écrit : "Si paradis il y a, paradis ne sera que si j'y suis accueillie par mes chiens et mes chats."

samedi 2 mars 2024

Les guerres de Lucas - Renaud Roche et Laurent Hopman.


Scrupuleusement fidèle à la réalité historique, méticuleusement documenté, Les Guerres de Lucas met en scène l’invraisemblable épopée de George Lucas, enfant rebelle passé à côté de la mort, prodige du nouvel Hollywood et visionnaire indomptable.

Une exploration inédite des coulisses de Star Wars, de l’enfer du casting au tournage cauchemardesque, où querelles entre acteurs, histoire d’amour secrète et désastres en pagaille jalonnent le quotidien. Un bourbier gigantesque dont sortira pourtant une œuvre majeure qui changera à jamais le cinéma.

Les Guerres de Lucas est une plongée en apnée dans les affres de la création, intense et poignante, mais drôle malgré tout. Making of ultime, success-story jouissive et leçon de cinéma, une ode à la magie de l’enfance et à la persévérance.


Je m’étais jurée d’en finir avec les achats impulsifs, après en avoir tant fait il y a des années pour finir avec des livres dont, pour la plupart, je n’ai jamais lu. Mais, quand j’ai vu cet ouvrage, comment aurais-je pu résister, quand Star Wars m’accompagne depuis mon adolescence, depuis ma découverte de la première trilogie en K7 puis de la prélogie au cinéma.


Je ne regrette pas du tout cet achat. Cet ouvrage est un petit bijou pour quiconque aime, a grandi (ou pas) avec Star Wars et veut découvrir ou redécouvrir l’histoire de son créateur, George Lucas, et comment Star Wars, l’œuvre de sa vie, est venu au monde.



L’ouvrage se présente donc comme une biographie de George Lucas. Natif de Californie, il a dévoré de nombreux comics et pulp magazines dans sa jeunesse. Fan des courses automobiles, il s’est d’abord rêvé pilote professionnel avant d’intégrer l’école de cinéma, malgré l’opposition de son père qui souhaitait le voir reprendre le commerce familial, où il produira de nombreux courts métrages et fera la rencontre de Marcia, monteuse, qui deviendra son épouse, et Francis Ford Coppola avec qui il se liera d’amitié. On découvre un homme passionné, travailleur, introverti et qui parle peu. On apprend aussi ses faiblesses, ses soucis de santé notamment dû à son anxiété (il n’hésitait pas à se couper des mèches de cheveux quand il était en stress), mais c’est aussi un homme avec un rêve, une vision, une créativité et un sens du détail. J’ai également beaucoup aimé découvrir l’importance de Marcia, son épouse, véritable pilier dans la vie de son époux, aussi bien sur le plan personnel que professionnel car elle a aussi apporté sa pierre à l’édifice « Star Wars » et l’a aidé à sauver son film.



Car, bien-sûr, on ne peut pas parler de George Lucas sans évoquer Star Wars, l’œuvre de sa vie et ce roman graphique est vraiment une lettre d’amour à cette saga. Les auteurs sont des fans et cela se ressent aussi bien dans l’écriture que dans le graphisme.


Les guerres des Lucas… titre à la fois évoquant Star Wars, aussi connu sous le titre de La Guerre des Étoiles, mais aussi parce que c’est une véritable guerre que George Lucas et son entourage ont du mener pour s’imposer face aux studios qui le produisait, et pour que Star Wars puisse enfin voir le jour. Ce qui nous est dépeint dans ce livre n’est pas un joli conte de fées comme Hollywood aime les montrer. La réalisation de Star Wars fut un combat mené sur plusieurs fronts qui mit plusieurs fois en péril la santé de son créateur, et la route fut bien longue et semée d’embûches pour faire accepter son film aux studios hollywoodiens réfractaires aux idées novatrices, sans oublier les multiples réécritures de son scénario jugé (à raison) comme trop complexe ou fouillis, et le tournage chaotique entre les mauvaises conditions météorologiques, les problèmes techniques ou les conflits entre acteurs.

Annoncé dès le départ par les studios et des personnes extérieures comme une catastrophe cinématographique, Star Wars a su s’imposer comme l’un des plus gros succès de tous les temps et trouver rapidement son public, notamment grâce à des effets spéciaux révolutionnaires, des effets sonores créatifs et mémorables ainsi qu'une musique inoubliable signée John Williams, et des personnages pour la plupart mémorables (notamment Dark Vador qui s’est imposé comme l’un des méchants les plus cultes du cinéma).



Si j’ai aimé découvrir la vie de Lucas, j’ai également beaucoup aimé découvrir l’histoire derrière Star Wars, comment ce projet impossible s’est concrétisé, contre vent et marée. J’ai beaucoup aimé les différentes anecdotes de tournages dont certaines qui font vraiment sourire ou qui émeuvent. C’est un bijou truffé d’anecdotes et d’information et de références. On apprend vraiment plein de choses, dans les moindres détails (d’où vient le design de Chewbacca ? Le bruit des sabre-lasers ou des droïdes ? Les vaisseaux spatiaux ?). C’est aussi très enrichissant de découvrir le fonctionnement de l'industrie du cinéma en général à travers le livre.



Quel plaisir aussi de voir sur papier les acteurs (Mark Hamill, Carrie Fisher, Harrison Ford, Alec Guinness, Peter Cushing, etc), comment ils ont obtenus leur rôle, les liens qui se sont tissés entre eux ou même les conflits, les histoires d’amour, mais quel plaisir aussi de croiser d’autres personnages connus, que ce soit brièvement ou pendant quelques scènes, comme SpielbergCoppola, et certains jeunes acteurs et actrices encore illustres inconnus tels que Jodie Foster, John Travolta ou Christopher Walker qui ont auditionné pour des rôles dans Star Wars (chose que j’ignorais). Après, sans doute est-ce un peu romancé (je pense qu’Alec Guinness n’était pas aussi convaincu par le film au départ, par exemple), mais je laisse passer car j’ai vraiment apprécié ma lecture !



Je ne m’étendrai pas davantage sur cet ouvrage, car il y a tant à dire. Pour résumer, c’est une biographie rythmée, drôle, touchante et passionnante de bout en bout, une vraie mine d'or pour tous les amoureux de cette saga ! Je remercie les auteurs de m’avoir immergé dans cet univers qui me suit depuis des années !


Pour terminer, la musique iconique !

mercredi 28 février 2024

Autopsie des morts célèbres - Philippe Charlier et David Alliot.

Comment est morte Lucy, notre ancêtre commun ? Pourquoi et comment le corps de Saint Louis a été dispersé à travers le monde ? Que nous apprend l’étude du cerveau de Descartes ? Est-ce que Balzac a été tué par sa folie créatrice ? Hitler s’est-il suicidé dans son bunker en mai 1945 ?

L’Histoire est pleine de mystères, c’est peut-être ce qui fait son charme… Les résoudre est une aventure passionnante qui s’étend sur plusieurs siècles. N’étant plus une discipline monolithique, l’Histoire voit désormais s’étendre son champ d’action tandis qu’elle s’enrichit de rapports fructueux avec d’autres sciences humaines et fondamentales : anthropologie physique, ethnologie, archéologie, biologie. La récente apparition de la paléopathologie – cette médecine appliquée aux cadavres anciens – a permis de réelles avancées dans le domaine des connaissances et a même contribué à résoudre des « énigmes historiques » depuis longtemps insolubles. Cette nouvelle méthodologie nous aide à mieux comprendre le quotidien et le mode de vie des populations du passé (tordant le cou, au passage, à quelques idées reçues…) et éclaire aussi, parfois, la mort de patients « célèbres ». 

À travers ces cas médico-historiques, dont beaucoup ont peuplé nos manuels scolaires, c’est une nouvelle façon d’écrire et d’appréhender l’Histoire qui s’ouvre devant nous.


Je découvre Philippe Charlier avec cet ouvrage qui s’est révélé être une belle découverte.



Autopsie des morts célèbres propose d’apporter un nouvel éclairage sur les morts de personnages célèbres de l’Histoire : comment notre ancêtre Lucy est-elle morte, que révèle l’autopsie d’époque de la mort de Louis XIV et les études plus contemporaines, comment expliquer les morts subites de nombreux courtisans de la cour de Versailles sous le règne de Louis XIV, l’étude du cerveau de Descartes nous permet-il de déterminer son fonctionnement intellectuel et les raisons de son décès, l’étude de fragments du crâne d’Hitler peut-elle déterminer les causes exactes de sa mort, et ainsi de suite. Il revient sur ce que les sources d’époque ont révélé et ce que des études plus récentes ont permis d’apporter, si elles ont permis de confirmer ou réfuter la cause véritable de la mort de ces personnes célèbres.



L’auteur nous raconte ainsi comment différentes sciences ont permis d’éclaircir certains cas et d’identifier des restes humains et de les différencier d’autres restes humains ou d’animaux, de reconstituer un visage (celui de Marie-Madeleine), de dévoiler une supercherie (l’homme préhistorique de Moulin-Quignon), de révéler les causes d’un décès (Balzac, Philippe d’Orléans, etc), de faire la lumière sur l’état de santé d’une ou plusieurs personnes, voire de proposer de nouvelles hypothèses. Pour répondre à ces questions, il a fallu toucher à de nombreuses disciplines : la paléopathologie, l’anthropologie, la médecine, l’archéologie, etc, preuve que l’Histoire est vraiment une pluridiscipline, et d’appuyer la nécessité d’étendre ses champs de recherche à différents domaines pour répondre à des questions d’Histoire.



C’est donc un ouvrage qui revient sur ces morts célèbres, mais pas que puisque l’auteur nous parle de la gynécologie et la perception du corps féminin dans l’Antiquité et les croyances d’époque qui nous sembleraient aujourd’hui ridicules et incroyables (enfin remarquez, quand on voit certains cas sur les réseaux sociaux qui sont persuadés que le nombre de partenaires sexuels peut changer l’aspect d’un vagin, on se dit que les croyances ridicules sont intemporelles), l’étude des reliques (celles de Saint Louis, notre roi puzzle, dont les reliques ont été dispersées partout en France, ou presque, ou encore celles de Marie-Madeleine).



Il nous parle aussi de médecine à travers les maladies préhistoriques et autres bactéries encore prisonnières dans la glace de l’Antarctique, la naissance et l’évolution des hôpitaux ou encore ces maladies qui étaient méconnues à l’époque et qu’on peinait à soigner. J’ai trouvé passionnant le fait d’apporter un diagnostic aux maux et maladies de certains personnages, d’autant plus que certaines maladies étaient méconnues à l’époque et n’étaient pas soignées comme elles le sont aujourd’hui, notamment le cancer ou le diabète.



L’auteur revient également sur le serment d’Hippocrate en le décodant, sur la définition à donner à la mort (entre la mort définitive, la mort cérébrale, etc), les expériences de mort imminente. Il nous parle de génétique à travers les prétendus descendants français d’Hitler. L’aspect éthique et légal des sujets est évoqué, notamment sur la question de la restitution des restes humains à leurs légitimes propriétaires, et qui ont jadis été obtenus de façon légale ou illégale (les têtes maoris, les momies, les collections anatomiques des écoles de médecine, etc).



On pourrait reprocher le fait que ce livre, malgré son titre, ne parle pas uniquement des morts célèbres et s’intéresse à plusieurs sujets comme ceux évoqués ci-dessus, et qui ne semblent pas pertinents avec le sujet initial (pourquoi parler de gynécologie et de mort infantile dans l’Antiquité dans un ouvrage qui a vocation de parler des morts célèbres par exemple) mais j’ai été si passionnée par ma lecture que je laisse passer ces écarts. Néanmoins, quelques points m’ont chagriné au cours de ma lecture, notamment certains chapitres trop courts qui auraient mérité plus de développement et qui ont fait que je suis restée sur ma faim.



J’ai également trouvé un peu problématique le classement des périodes historiques. L’auteur a classé chaque cas dans une période historique distincte de la Préhistoire à l’époque contemporaine. Or, l’auteur a classé certains cas ou personnalités du XIXe siècle dans l’époque moderne, alors que le XIXe siècle fait partie de l’époque contemporaine, ou que la partie où il décortique le serment d’Hippocrate aurait peut-être été plus pertinente dans la partie consacrée à l’Antiquité, mais c’est vraiment histoire de pinailler car l’ouvrage est vraiment enrichissant. On découvre bien, à travers son texte, qu’il ne se contente pas de raconter mais que tout ceci fait partie de son propre travail de recherche, à la fois à travers les sources documentées et le travail sur le terrain.



En résumé, un ouvrage passionnant mêlant médecine, archéologie, anthropologie, Histoire et bien plus encore. La lecture est simple, bourrée d’anecdotes étonnantes et de découvertes passionnantes.


La paléopathologie, c'est-à-dire l'étude médicale des restes humains anciens, permet de remonter le temps de façon très pragmatique pour ne pas dire cartésienne. Elle fonde ses connaissances sur l'examen direct de squelettes, momies, reliques, bref tout fragment corporel suffisamment bien conservé pour pouvoir se prêter à un diagnostic rétrospectif. Ses outils ? Ceux des patients vivants : radiographie, scanner, fibroscopie, microscope, analyses toxicologiques et génétiques, etc. Une momie égyptienne peut passer sur la table de scanner, une poupée vaudou haïtienne peut être radiographiée. Des résidus de selles provenant de latrines antiques peuvent être analysés en parasitologie... Bien entendu, les urgences médicales passent toujours en premier !

5. Fils des âges farouches - Le vrai visage de Cro-Magnon (I) 

 

dimanche 25 février 2024

Les sœurs hiver - Jolan Bertrand et Tristan Gion.


Il y a très longtemps, il y avait deux hivers : la Grande, avec ses froids polaires et ses blizzards, et la Petite, avec ses glissades joyeuses et ses batailles de boules de neige. Mais depuis que la Petite a disparu, tout est détraqué au village de Brume ! 

Les adultes sont inquiets, plus personne ne rit aux bonnes farces d'Alfred et, surtout, les trolls passent leur temps à voler des objets, qu'ils emportent à tout jamais dans la taïga. 

Lorsque l'oncle d'Alfred se porte volontaire pour rapporter les objets volés et qu'il disparait sous ses yeux, avalé par la tempête, c'en est trop : il faut partir à sa recherche, coûte que coûte, braver les dangers de la forêt boréale, et affronter la Grande Hiver...




Je n’attendais pas grand-chose de ce roman jeunesse, outre de passer un moment de divertissement. Au final, c’est un mini coup de cœur que j’ai eu avec ce joli petit roman hivernal qui mêle aventure, nature, mythologie nordique, magie et inclusivité.


C’est un roman court qui se dévore en une journée, agrémenté par les magnifiques illustrations de Tristan Gion qu’on dévore en même temps que les mots de Jolan Bertrand. Férue de mythologie, je n’ai pas été insensible à la place de choix que s’offre la mythologie nordique, surtout en la présence de Loki, divinité du panthéon nordique que j’affectionne énormément. Forcément, cet aspect a été mon préféré du roman, mais celui-ci regorge d’autres éléments tout aussi plaisants et même envoûtants. J’ai trouvé ingénieux que l’auteur nous présente l’Hiver à travers deux figures différentes mais complémentaires, deux sœurs représentant un aspect différent de l’hiver, mais qui sont inséparables. J’ai aimé l’intrigue autour de la disparition de la Petite Hiver et comment notre jeune héro, Alfred, se met en quête de la retrouver pour apaiser la colère de la Grande Hiver et que son oncle lui soit rendu et que son village ne soit plus victime des hivers rudes et des trolls leur volant leurs affaires.



J’ai beaucoup aimé le personnage d’Alfred, son esprit d’aventure couplé à son côté farceur, mais aussi son attachement à son oncle Agnar, ses moments de mélancolie qu’il a parfois. C’est un petit garçon facétieux et attachant que l’on suit avec plaisir au gré de ses aventures, et parfois même mésaventures, dans lesquelles il n’y a pas de temps mort, où l’on rencontre trolls, renard parlant et sournois, les sœurs Hiver, le tout dans un décor forestier et hivernal, dans un univers scandinave empreint de magie, avec des notions sur le peuple viking et le peuple sami, ce qui nous dépayse le temps de la lecture. J’ai aimé découvrir des personnages tels que les sœurs Hiver, la grand-mère, l’oncle Agnar mais aussi et surtout Loki. J’ai d’ailleurs été agréablement surprise de la façon dont l’auteur a choisi de l’écrire et de le représenter [spoiler] divinité connue pour ses farces tantôt drôles, tantôt cruelles, il n’est pourtant ici ni blanc ni noir. Il a ses tords, et a causé bien du mal et du souci à nos personnages mais il nous est dévoilé comme un dieu avec lequel on sent qu’on peut s’amuser, un dieu qui souffre de solitude, qui n’est pas accepté par les autres dieux mais n’ose avouer que cela l’affecte, ainsi il recherche l’affection ailleurs, sans toutefois s’y prendre correctement [/spoiler]



J’ai été agréablement surprise de l’inclusivité (c’est rare dans les romans jeunesse, je trouve) à travers l’oncle d’Alfred, le dieu Loki bien évidemment qui est genderfluid, ou encore les trolls qui ne sont ni l’un ni l’autre et qui emploient les pronoms ul/uls, et la société dans laquelle évolue Alfred nous semble bienveillante et tolérante.



Les sœurs Hiver est un joli petit roman empreint de poésie et de magie, qui aborde aussi bien les thèmes de la famille, l’amitié, le réconfort que l’on s’apporte que des thèmes plus durs comme la solitude et la dépression avec beaucoup de justesse et de naturel. Ajoutons à cela l’aspect visuel à travers l’objet livre mais aussi les magnifiques illustrations qui accompagnent notre lecture. C'est doux, frais, touchant. Un régal pour les yeux !


– En quoi des bûches peuvent réconforter qui que ce soit ?

Cheveux Violets le regarde d’un air très sérieux.

– Ne te réconfortent-elles pas, Alfred, lorsque ton oncle et ta grand-mère en apportent chez toi pour alimenter le feu ? Ce ne sont pas les bûches en elles-mêmes qui sont réconfortantes. C’est ce que vous en faites, vous, les humains. Les bûches vous permettent d’avoir chaud. Vous vous rassemblez autour du feu pour être ensemble et raconter des histoires. Les bûches vous rendent heureux. C’est cela que nous cherchons lorsque nous venons en voler dans vos réserves, nous, les trolls. Vous brûlez les bûches pour leur chaleur. Nous les collectons pour la joie et le réconfort qu’elles vous apportent. Après tout, ajoute Cheveux Violets avec un petit soupir, nous ne sommes que des cailloux. Les émotions, ce n’est pas notre fort.

lundi 19 février 2024

La dernière Anastasia - Tina Muir.


Il était une fois en Russie, à l’hiver 2018, une jeune femme du nom d'Anna. Son père l'avait emmenée vivre au plus profond de la forêt, dans une maison coupée du reste du monde pour la protéger d'une malédiction de sang pesant sur sa famille depuis des générations. Lorsque toute sa famille fut brutalement assassinée, seule la belle Anna aux cheveux d’or en réchappa, avec l’aide de la plus terrible des marraines, la Baba Yaga en personne…

Mais l’aide de la sorcière légendaire n’est jamais gratuite. Pour percer le secret macabre qui a détruit sa famille, remonter la piste des tueurs et satisfaire sa surnaturelle protectrice, Anna devra compter sur le preux chevalier mit sur sa route par la Baba Yaga. De cette rencontre entre Anna la survivante, ivre de chagrin et avide de réponses, et le beau Jervis, aventurier flegmatique dont l’apparente froideur cache une lourde blessure, naîtra un amour de glace et de feu. Mais seront-ils assez forts pour affronter le plus destructeur des secrets et payer son tribut à la Baba Yaga ?



Roman qui mélange notre époque avec le folklore russe, une histoire de malédiction familiale avec de nombreuses références à l’histoire tragique des Romanov, et la Baba Yaga comme personnage important, La dernière Anastasia avait tous les ingrédients pour me plaire. Pourtant, je ressors de ma lecture extrêmement frustrée et même déçue.



Je vais d’abord commencer par les points positifs. J’ai beaucoup aimé l’histoire autour de la malédiction de sang dont est victime la famille de notre héroïne. L’auteure parvient à maintenir le suspense jusqu’au bout et à nous donner les informations qu’au compte-goutte. Elle a su titiller notre curiosité tout au long de l’intrigue, je peux bien lui reconnaître ce point. Même lorsque tout me semblait ridicule, des personnages jusqu’à la romance, la promesse d’avoir des réponses et un dénouement à cette histoire de malédiction était comme la carotte que me tendait l’auteure pour me forcer à poursuivre ma lecture jusqu’au bout, et je dois dire ne pas avoir été déçue des tenants et aboutissants. J’ai trouvé très intéressant de découvrir les origines de cette malédiction et ses conséquences à travers l’histoire et notamment l’Histoire, qui s’est mêlée à l’histoire tragique des Romanov.



Les références, tout au long du roman, à la famille Romanov, la tragédie de leur assassinat et la Russie du début du XXe siècle avec la révolution était d’ailleurs un des rares bons aspects du roman. Passionnée d’Histoire oblige, je n’y ai pas été insensible, d’autant plus que c’est une partie de l’Histoire qui me passionne et qu’on ne peut rester insensible à la tragédie qu’a vécu cette famille, et le parallèle entre les Romanov et la famille de l’héroïne (dont certains membres partageaient les mêmes prénoms que ceux de la famille du tsar).



J’ai également beaucoup aimé la présence du folklore russe dans l’intrigue et comment l’auteure confronte notre monde moderne aux contes russes, notamment à travers la figure de la Baba Yaga, mais pas que, mais la Baba Yaga s’est offerte ici une place de choix et elle doit bien être le seul personnage du roman que j’ai vraiment apprécié. Cette ancienne et puissante sorcière ne laisse pas indifférent, elle en impose et nous marque à chacune de ses apparitions. On ne sait dire, au début, si elle est bonne ou mauvaise, si ses intentions sont aussi bienveillantes qu’elles en ont l’air, et sa relation avec l’héroïne est plutôt intéressante, officiant auprès d’elle comme une sorte de marraine, de protectrice mais dont il faut se méfier car elle ne fait jamais rien gratuit. J’ai aimé comment la figure de la Baba Yaga s’est inscrite dans l’histoire de la tragédie des Romanov et de la révolution russe, et découvrir ses véritables desseins.



Tout ceci constitue de très bons ingrédients pour une histoire prometteuse, mais de nombreux points noirs ont gâché ma lecture. Je pense notamment aux personnages que je trouve inintéressants. Je n’ai pas su m’attacher à eux. Ni à l’héroïne trop Mary-Sue à mon goût, à Jervis mi-mâle Alpha mi-chevalier servant, au frère de celui-ci et à Joséphine, la femme qu’il aime en secret.



La romance est beaucoup trop omniprésente à mon goût, d’autant plus qu’elle se met en place très rapidement. Nos personnages se connaissent à peine qu’ils sont déjà prêts à tout pour l’autre et se font instantanément confiance. Pour la crédibilité, on repassera. Que dire des nombreuses scènes de sexe que j’ai trouvé ridicules et inutiles, entre Anna qui est vue, par son amoureux, par une Wonder Woman qui fait se lever le soleil et chanter les oiseaux, Jervis qui est vu comme un rapace que l’héroïne a dompté par ses charmes. On retrouve d’ailleurs beaucoup de comparaisons entre nos personnages et des animaux sauvages à dompter. Je n’ai pas non plus été sensible à la romance entre Liam, le frère de Jervis, et Joséphine.



J’ai fini par survoler de nombreux passages concernant nos deux couples, que ce soit la tension amoureuse ou les scènes de cul où l’auteure parle de magnétisme animal, d’instinct masculin ne pouvant résister aux charmes féminins et… *-relis-* de corps qui s’attirent avec un magnétisme irrésistible (dixit le roman qui possède d’ailleurs une panoplie de passages du style : « Il ne fit rien pour s’interrompre ou attraper son tee-shirt. Qu’elle profite du spectacle. Il le lui dédicaçait. [Elle] l’observa. Liam lui offrait une véritable leçon d’anatomie masculine. »). Enfin, dieu merci, on est pas au même niveau qu’Hadès et Perséphone de Scarlett St Clair !



L’intrigue à travers le mystère autour de la mort de la famille de l’héroïne, l’histoire de la malédiction de sang, la Baba Yaga, les références aux Romanov, tout ceci constituent de bons ingrédients et sont les points positifs de l’histoire, malheureusement ces derniers ne parviennent pas à sauver le roman. Je trouve même dommage et frustrant qu’il faille attendre 60 % du roman avant d’entrer enfin dans le vif du sujet, de par des longueurs qui rendent la lecture laborieuse mais surtout le fait que l’intrigue principale est noyée dans deux romances grotesques qui ont trop souvent pris le pas sur l’histoire.



C’est vraiment dommage, car j’aurais vraiment aimé tomber amoureuse de ce roman, car il a énormément de potentiel mais qui a été gâché par des longueurs, des personnages non attachants et des romances qui m’ont fait lever les yeux au ciel plus d’une fois.


— Vous étiez là du temps des Romanov, dit Anna.

— J’ai toujours été là, fillette.

— Vous les regardiez danser de derrière les vitres de leurs palais.

— Ce monde a été englouti depuis. Il ne reste plus que des fantômes. Beaucoup de fantômes.

— Vous n’êtes pas un fantôme, affirma Anna.

— Je suis ce que je suis.