samedi 31 août 2013

Joyeux Noël.


Joyeux Noël,

Réalisé par Christian Carion.
1h55min.
Sorti en 2005.



Avec : Diane Kruger, Guillaume Canet, Benno Fürmann, Gary Lewis, Daniel Brühl, Dany Boon, Bernard Le Coq, Robin Laing, Lucas Belvaux, Alex Ferns...






Synopsis :

Lorsque la guerre surgit au creux de l'été 1914, elle surprend et emporte dans son tourbillon des millions d'hommes. Nikolaus Sprink, prodigieux ténor à l'opéra de Berlin, va devoir renoncer à sa belle carrière et surtout à celle qu'il aime : Anna Sörensen, soprane et partenaire de chant. Le prêtre anglican Palmer s'est porté volontaire pour suivre Jonathan, son jeune aide à l'église. Ils quittent leur Ecosse, l'un comme soldat, l'autre comme brancardier...

Mon avis :

Ces derniers jours, j'ai eu envie de revoir le film Joyeux Noël.
Je savais bien que ça allait m'émotionner à l'extrême, en me faisant passer du rire aux larmes, me faire pleurer un bon coup devant I'm dreaming of home et devant les jeux d'acteurs, mais je voulais vraiment revoir ce film et le revoir m'a fait reprendre conscience à quel point j'adore ce film ! J'étais encore au collège lorsque j'ai vu ce film pour la première fois, c'était en 2005 et avec ma classe et ma professeur de français de l'époque, nous avions été le voir au cinéma du coin, j'en étais ressortie toute chamboulée et ça a signé le début d'une histoire d'amour entre moi et ce film. 

L'été 1914 marque le début de la première guerre mondiale, obligeant ainsi des millions d'hommes à quitter leur foyer pour rejoindre le front, on espère une guerre rapide. Parmi ces hommes forcés de rejoindre le front, il y a un ténor allemand, Nikolaus Sprink, qui doit mettre un terme à sa carrière à Berlin et sa compagne à la vie comme à la scène ; il y a le prêtre écossais Palmer qui choisit de se faire brancardier pour mieux veiller sur Jonathan, son jeune protégé engagé en tant que soldat avec son frère aîné ; il y a le lieutenant Audebert, rongé par l'inquiétude depuis qu'il a dû quitter sa femme enceinte de cinq mois pour partir au front et dont il n'a aucune nouvelle depuis des mois, et qui doit cacher sa peur et ses inquiétudes à ses soldats qui attendent tout de lui. Il y a aussi Anna Sorensen qui cherche à revoir son compagnon, le ténor, le temps d'une nuit à noël, il y a le jeune Jonathan, rongé par le chagrin, qui cache une terrible vérité à sa mère dans ses lettres, il y a l'aide de camp français, le ch'ti Ponchel, qui rêve de prendre le café avec sa mère comme avant... Puis la guerre, censée être courte, s'installe dans les tranchées du nord de la France, en même temps que la boue, les poux, la neige, les morts, le froid. Et, à noël, l'impensable survient : les hommes décident d'abandonner, le temps des festivités, les armes pour s'accorder une trêve et pour fraterniser avec ceux d'en face, ceux qu'on a pourtant décrit comme étant des monstres sanguinaires à abattre à tout prix, à qui on vient serrer la main, échanger du chocolat ou une cigarette, et pour lui souhaiter un Joyeux noël, tout simplement...


Image tirée du film avec, de gauche à droite, le lieutenant Audebert, joué par Guillaume Canet, la cantatrice Anna Sorensen jouée par Diane Kruger, et le lieutenant Horstmayer joué par Daniel Brühl.


En ce qui concerne l'histoire, Christian Carion a repris un événement historique réel, son film se base sur des faits réels, et a su parfaitement développer ces faits réels pour en faire une histoire tout simplement magnifique, émouvante et humaine. Il ne s'agit pas d'un bon vieux film de guerre, ce film montre les horreurs de la guerre, certes, et fait comprendre que les soldats ne sont vus que comme des pions, mais ce film offre une autre vision de la guerre. Les trêves de noël ne sont pas une révolte contre l'absurdité de la guerre ou contre la hiérarchie  les dirigeants qui se sont déclarés la guerre, c'est simplement une histoire dans laquelle les soldats sont des hommes qui ont souhaité s'accorder une trêve le soir de noël, qui se sont rapprochés avec les autres troupes. Ces soldats trouvent alors difficile de reprendre les armes après la trêve car l'ennemi est devenu un ami, un camarade avec qui jouer au foot, avec qui boire, manger, chanter des chants de Noël, rire, bavarder, échanger des photos de leur famille ou des cigarettes, du chocolat, des bouteilles d'alcool. Ils voient les autres soldats ennemis d'un œil différent. Même si, du coup, Christian Carion nous montre tout de même toutes les atrocités de la guerre et sur ses conséquences dramatiques. Il n'y a pas de bons ou de méchants ici, simplement des hommes, que l'on a envoyé pour être des machines à tuer, face à un conflit qui les dépassent.



L'affiche anglophone du film.

Certains se remettent en cause, remettent en cause la guerre ou leurs supérieurs qui les pressent à combattre et qui ne comprennent pas pourquoi ils ont osé fraterniser avec l'ennemi. Guillaume Canet, dans son rôle du lieutenant Audebert, a alors cette très belle parole : "On ne vit pas la même guerre", précédé d'un "Je me suis senti bien plus proche des Allemands que ceux qui crient 'mort aux Boches !' chez eux, bien au chaud devant leur dinde aux marrons" et que si personne n'ira raconter qu'il a fraternisé avec l'ennemi, ce n'est pas par honte ou par crainte d'être fusillé ou accusé de trahison, c'est parce que personne ne comprendra. Dans cette histoire, au moment de noël, l'homme laisse le soldat derrière lui.






Et pourtant, cela n'a pas été si simple au départ. Le premier contact a été initié par le ténor, les autres soldats l'ont suivi, puis ont été encouragés par les soldats écossais, ça a été un peu compliqué avec les Français chez qui la fraternité n'a pas été aussi spontanée que chez les Écossais  ils étaient sans doute un peu plus haineux et rancuniers à l'époque quand on se rappelle de leur dernière guerre avec les Allemands en 1870 qui avaient pris l'Alsace-Lorraine. Pourtant, Ponchel, l'aide de camp ch'ti joué par Dany Boon, donnera le "signal" à ses compatriotes qui vont réagir avec les mêmes sentiments humains. J'ai vraiment beaucoup aimé la complicité qui s'établit entre les soldats et leur lieutenant, qui va au-delà de noël, mais plus que tout, l'amitié naissante entre les lieutenants français et allemand, Audebert et Horstmayer qui est l'un des aspects du film que je préfère, pas seulement parce que c'est ironique dans un sens qu'un français et qu'un allemand s'entendent en pleine guerre mondiale, mais je trouve ces personnages, et surtout leur amitié, touchante, surtout lorsqu'ils se disent à la fin qu'en d'autres circonstances, ils auraient pu être amis et qu'ils se promettent de se revoir après la guerre, boire un verre, rue Vavin.

Nous avons vraiment des personnages fort en émotions et très bien dépeints : le prêtre, presque un mentor, aux idées très chrétiennes qui aura l'occasion de célébrer une messe le jour de noël, Jonathan le soldat rongé par la haine et le chagrin, Ponchel à la fois comique et sérieux, naïf mais attendrissant et simple, tout l'amour et la complicité entre les deux amants Sprink et Anna qu'il est difficile de voir l'un sans l'autre, Gordon le commandant écossais, impressionné par ce débordement humain, et ses "normal, c'est comme ça !".



Nikolaus Sprink, le ténor allemand, joué par Benno Fürmann.

On a aussi des musiques magnifiques comme I'm dreaming of home qui est LA chanson du film (je craque à chaque fois que je l'entends... plus particulièrement à la fin du film où chaque division de soldat est séparée et chante la chanson pour se souvenir et se redonner du courage), Ce n'est qu'un au-revoir joué à la cornemuse par les Écossais, l'Ave Maria chanté par Anna Sorensen, Still Nacht chanté par Sprink, Bist du bei mir chanté par les deux amants. Beaucoup de débordements d'émotions avec la musique, les jeux d'acteurs aussi, rien que les expressions d'horreur avant et pendant le champ de bataille, les expressions de surprise et d'émerveillement le soir de noël quand tous se mettent à chanter et à se rejoindre... n'allez pourtant pas croire que c'est déprimant à souhait ! Quelques notes humoristiques viennent détendre l'atmosphère, pas seulement avec Dany Boon, comme la scène où Palmer, avec la complicité d'un soldat, tourne en dérision un officier ma foi très sévère ; ou la scène où Ponchel et un soldat allemand se disputent sur le vrai nom du chat qui passe parfois dans les tranchées, et ce pauvre chat qui ne sait répondre à quel prénom, entre "Nestor" et "Félix"...

Je crois que je vais m'arrêter là car je me sens encore capable de m'épancher encore sur le sujet, et comme j'aurais dit en anglais, this movie give me a lot of feelings !!, toujours est-il que c'est un film magnifique, très émouvant qui saura toucher par sa simplicité, son humanité et son histoire qui prouve que même en temps de guerre, l'amitié et la solidarité ne sont pas des valeurs perdues. C'est vraiment un film que je recommande vivement !!



Les lieutenants Gordon, Audebert et Horstmayer.


jeudi 15 août 2013

Robert des noms propres - Amélie Nothomb.





Pour un écrivain, il n'est pas de plus grande tentation que d'écrire la biographie de son assassin. Robert des noms propres : un titre de dictionnaire pour évoquer tous les noms qu'aura dits ma meurtrière avant de prononcer ma sentence. C'est la vie de celle qui me donne la mort.









Je continue petit à petit mon avancée dans la bibliographie d'Amélie Nothomb. Cette fois-ci, j'attaque avec Robert des noms propres (je dois avouer que l'auteur a le don de nous sortir des titres originaux), un livre qui m'a tenté par son résumé, pensant vaguement que ça ressemblerait un peu à Cosmétique de l'ennemi où une personne rencontre son assassin qui lui livre un long récit avant de l'assassiner. Pourtant, l’auteure est parvenue à me surprendre et me faire prendre un autre chemin…


Plectrude, le personnage principal, est une fille hors du commun. Déjà, de par son prénom ; par les circonstances de sa venue au monde et par ses grands yeux d'un regard pénétrant, beau et inquiétant. "Elle a le regard d'une danseuse" s'extasie-t-on. Eh bien, danseuse Plectrude sera. Sa vie n’a pourtant rien de tendre avec une mère qui l’idolâtre et un père qui ne sait pas dire non aux caprices de sa femme. Détestée à l'école où elle est considérée comme un cancre mais vénérée dans ses cours de danse où on lui prédit une magnifique carrière de danseuse, Plectrude vit pour cet art qui est devenu sa seule et unique passion. Peu lui importe l'école, les amies et même la nourriture, elle vivra pour la danse et sa vie sera semblable à un ballet dont elle est l'héroïne tragique, car la vie est comme un théâtre...


Tout le long du roman, je n'ai pas pu m'empêcher de penser au film Black Swan. Le livre et le film sont bien différents mais possèdent quelques similitudes comme le thème de la danse ou l'autodestruction de l'héroïne, une danseuse née qui ne vit que pour la danse, ou encore la rigueur imposée et la perfection recherchée à tout prix dans ce domaine vu comme féerique, idéal, majestueux mais qui est dur et impitoyable, la mère qui vit par procuration à travers les rêves de sa fille qui furent les siens avant...


Je ne peux m'empêcher de penser si, dans les grandes écoles ou les opéras, cet univers est aussi dur, froid et impitoyable que l'apprentissage de danse des Rats de l'Opéra est décrit dans le roman ; ou est-ce que c'est exagéré, pour rendre le roman encore plus fou, psychiatrique et dérangeant ?



Je trouve, comme dans d'autres romans de l'auteur, de l'étrangeté, du dérangeant, quelques références culturelles ainsi que l'ironie dans certains passages, de l'ironie et de l'humour noir.
Plectrude est un personnage atypique, dérangeant mais fascinant, dont la vie est faite de petits et grands drames, qui a vécu pour la danse et la beauté avant d'être brisée par ces dernières, sans oublier sa mère qui a une grande part de responsabilité dans la déchéance de sa fille, allant jusqu’à s’extasier devant tout ce que fait sa fille, rayonnant même quand celle-ci devient quasiment anorexique pour continuer à danser.  Tout cela donne l'occasion à l'auteure de pointer du doigt certains thèmes comme l'anorexie, la dépression, l'éducation... sur le ton de la dérision. C'est décalé, dérangeant mais toujours satirique.



Sans avoir été transportée, j'ai trouvé cette lecture sympathique, bien que déroutante, comme souvent chez un roman d'
Amélie Nothomb. Ne serait-ce qu'avec Plectrude, à peine gamine, qui a des pensées si adultes, si étranges pour un enfant, la scène dans la neige est un exemple mais c'est aussi ce côté étrange qui attire, qui rend unique ce que fait l'auteure. Bien que j'ai trouvé la fin de ce roman plutôt précipitée, je ressors conquise de ce roman, ce qui m’encourage à découvrir plus de romans de l’auteure !




Pendant ce temps, les autres enfants jouaient ensemble : la plupart se connaissaient déjà depuis l'école maternelle. Ils se racontaient des choses. Plectrude se demanda ce qu'ils pouvaient bien se dire.

Elle se rapprocha pour écouter. C'était un bruissement ininterrompu, produit par un grand nombre de voix, qu'elle ne parvenait pas à attribuer à leurs propriétaires : il y était question de la maîtresse, des vacances, d'une certaine Magali, d'élastiques, et donne-moi un Malabar, et Magali c'est ma copine, mais tais-toi t'es trop bête, maaaaiheuuuu, t'as pas des Carambar, pourquoi je ne suis pas dans la classe de Magali, arrête, on jouera plus avec toi, je le dirai à la maîtresse, ouh la rapporteuse, d'abord t'avais qu'à pas me pousser, Magali elle m'aime plus que toi, et puis tes chaussures elles sont moches, arrêteuh, les filles c'est bêtes, je suis content de ne pas être dans ta classe, et Magali...

Plectrude s'en fut, épouvantée.